Car quand on vit et travaille en Suisse, quand la production ou la sous-traitance se réalisent en totalité de manière indigène, les coûts de fabrication sont alors très élevés et les marges que nous pouvons pratiquer sont très serrées voir insuffisantes. Sans parler du montant des charges mensuelles inhérentes à la bonne marche d’une entreprise et à la location de locaux commerciaux.
Notre quotidien d’indépendant(e) oscille entre les besoins financiers frénétiques qu'engendre notre système économique suisse et le temps réel que demande un travail manuel artisanal et la gestion d’une entreprise. Malgré la mise en place d’un tarif/ horaire en adéquation avec les taux du marché, adapté à notre situation et notre expérience, toutes les heures durant lesquelles nous travaillons à la mise en place ou à la gestion de notre activité ne seront pas facturées. Le temps consacré à l’accueil, au conseil à la clientèle, à la réception des commandes, à la vente, à la gestion de notre communication, à l’administratif ou encore à la comptabilité seront à déduire du nombre d’heures totales où nous allons réellement gagner quelque chose. Sans oublier que le système de congés payés n’existe pas pour nous et que toutes les heures nécessaires à la fabrication d’un bijou ne sont pas facturées en intégralité. Pour finir, lorsque nous proposons nos œuvres dans les galeries ou les boutiques, il sera encore prélevé un pourcentage de 40 à 50% sur les ventes réalisées.
La valeur d'un travail créatif et artistique ne se calcule pas uniquement en temps et en coût.
Est-ce-que les bijoux d’auteurs n'ont qu'une valeur marchande ne comprenant que le nombre d'heures travaillées et le coût des matières utilisées ? Comment fixer un prix sur l'originalité, la créativité, la sensibilité, le savoir-faire longuement acquis ? Et que cette notion de valeur soit reconnue ? Comment faire pour vivre mieux, hors de cette notion de rentabilité " Le temps, c'est de l'argent ! " quand toutes les décisions de notre société sont basées là-dessus ?
Mon travail dépend de vos moyens et de vos achats qui dépendent de vos revenus et impôts qui dépendent de plein d'autres facteurs. Cela s'appelle l'interdépendance de l'indépendance...
Oui je regrette la lourde charge fiscale du canton de Neuchâtel qui ne permet plus de se faire plaisir. L’art, le plaisir et la joie ne sont pas un luxe mais une nécessité ! Au regard de notre société, il faut supprimer ce qui n'est pas rentable et la nécessité de diminuer les dettes de ce canton débouche sur la lente détérioration de notre qualité de vie, sans parler de la diminution voir de la suppression des enseignements liés aux disciplines artistiques dans les écoles. De même que les soutiens à la culture sont à la baisse. De mon point de vue, création = évolution. Autrement dit, une porte d'entrée (ou de sortie) vers une société plus humaine et épanouie. De nombreuses personnes reviennent à une vie plus créative pour se sentir mieux ou pour guérir.
Acheter un bijou directement auprès de la créatrice est un soutien financier direct qui permet de continuer le chemin.
Cela reste la seule manière efficace de contribuer au maintien des petits créateurs dans la région. Le consommateur joue un rôle important dans la définition de l'avenir des petits producteurs de la vie artisanale et également paysanne. Bientôt tous morts pour la Finance ? Ou souhaitons-nous garder de petits commerces de proximité, des métiers d’art et leur savoir-faire de qualité, des créateurs authentiques et passionnés ? Alors devenons acteurs de notre environnement en étant conscients de notre manière de consommer. Nos choix de consommation créent nos paysages commerciaux et notre réalité. C’est grâce à votre participation et à vos coups de cœur que de petites structures continuent d’exister et que certains artistes/artisans s’engagent encore à faire rayonner de magnifiques métiers pour vous offrir du rêve. Merci d’être là, car si vous êtes là, nous aussi !
Nadia Delprete